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Israël-Liban : nouvelles tensions autour de la « ligne bleue »

Les protestations des agriculteurs libanais, les affrontements entre soldats israéliens et libanais, les tirs de missiles et les bombardements israéliens sur le Liban-Sud aggravent depuis mars une situation déjà tendue
Un soldat israélien lors d’une patrouille dans le village de Ghajar, sur le plateau du Golan, à la frontière avec le Liban, le 6 juillet 2023 (AFP)
Un soldat israélien lors d’une patrouille dans le village de Ghajar, sur le plateau du Golan, à la frontière avec le Liban, le 6 juillet 2023 (AFP)

Les tensions à la frontière entre le Liban et Israël sont devenues une préoccupation quotidienne depuis que l’armée israélienne a terminé la construction d’un mur en juillet, incorporant la partie nord du village de Ghajar, sur le plateau Golan occupé.

Les protestations des agriculteurs libanais, les affrontements entre soldats israéliens et libanais, les tirs de missiles et les bombardements israéliens sur le Liban-Sud aggravent la situation depuis mars.

Des officiers de l’armée israélienne tiennent une position dominant le sud du Liban le 16 novembre 2017 (Reuters)
Des officiers de l’armée israélienne tiennent une position dominant le sud du Liban le 16 novembre 2017 (Reuters)

Ces derniers mois, Israël a construit un mur fait de blocs de béton le long d’une partie de la ligne bleue de l’ONU, qui délimitait les territoires libanais et israélien en 2000, lorsqu’Israël a mis fin à ses vingt ans d’occupation du sud du Liban.

Les deux pays restent ennemis et aucune frontière officielle ne les sépare, à l’exception de la « ligne bleue », qui est faite de barils bleus et va de la Méditerranée au Golan, à l’est.

Mardi, le Premier ministre libanais par intérim, Najib Mikati, a déclaré que son pays serait prêt à délimiter toute la frontière sud avec Israël.

Deux tentes indésirables

Le gouvernement libanais a également déclaré qu’il serait prêt à démanteler deux tentes installées en juin par le mouvement Hezbollah aux fermes de Chebaa, bande de territoire contesté à la frontière entre le Liban et le plateau du Golan, si Israël se retirait de la partie nord du village de Ghajar.

Le Liban considère la partie nord de Ghajar comme libanaise, tandis qu’Israël affirme qu’elle fait partie du plateau du Golan, un territoire syrien qu’Israël a annexé en 1981, un geste jamais reconnu par la communauté internationale.

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Les tentes du Hezbollah, sur la zone des fermes de Chebaa, connues des Israéliens sous le nom de mont Dov, ont suscité la colère des services de sécurité israéliens, qui ont demandé l’implication de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL) pour retirer l’une des deux tentes la semaine dernière.

Le ministre israélien de la Défense, Yoav Galant, a mis en garde contre les activités du Hezbollah aux fermes de Chebaa : « Ne sous-estimez pas notre force et notre détermination », a-t-il prévenu.

Les parties libanaise et israélienne ne se rencontrent jamais face à face mais utilisent la FINUL, qui patrouille le long de la barrière frontalière, comme canal de médiation.

La FINUL a appelé toutes les parties à « faire preuve de retenue et à s’abstenir de prendre des mesures susceptibles d’aggraver la situation ».

En avril, l’armée israélienne a bombardé le sud du Liban et accusé un groupe armé palestinien d’avoir tiré des roquettes vers le nord d’Israël. Il s’agit de l’incident le plus important à ce jour.

Des membres du Hezbollah blessés

Mais l’armée israélienne a également bombardé le sud du Liban la semaine dernière après que deux roquettes ont été lancées depuis la région.

L’une des roquettes est tombée près du village de Wazzani dans le sud du Liban, tandis que la deuxième roquette a atterri près du village contesté de Ghajar.

Le 10 juillet, les médias israéliens ont rapporté que des dizaines de soldats libanais et d’individus en civil avaient franchi la ligne bleue et étaient entrés dans une zone près de Manara, un kibboutz israélien dans la partie nord-ouest de la Haute-Galilée.

Mercredi, trois membres du Hezbollah libanais ont été blessés par des tirs israéliens près de la frontière avec Israël, a indiqué une source de sécurité dans le sud du Liban.

La radio de l’armée israélienne a déclaré que le 5 juillet, alors qu’Israël menait des travaux d’ingénierie près de la clôture, 30 personnes avaient traversé la frontière israélienne, s’étaient approchées d’un bulldozer mobilisé sur le terrain et étaient restées sur la zone pendant vingt minutes.

Un missile antichar aurait été tiré depuis le Liban et aurait atterri près du kibboutz de Manara le 4 juillet.

Des affrontements qui se sont intensifiés

Bien que les différends territoriaux soient depuis longtemps un problème épineux entre Israël et le Liban, les affrontements de ces derniers mois près de la barrière frontalière se sont intensifiés.

Les agriculteurs libanais des villages ont protesté contre les tentatives d’Israël de clôturer leurs terres le long de la ligne bleue, notamment autour de Kfar Chouba, Arkoub et Ayta ash-Shab.

Le 5 juillet, Israël a clôturé le village de Ghajar, situé à la frontière du Liban, d’Israël et du plateau du Golan.

Ses quelque 3 000 habitants se disent Syriens et appartiennent principalement à la communauté alaouite.

De nombreux habitants de Ghajar au sud de la ligne bleue de l’ONU de 2000 avaient pris la nationalité israélienne après l’annexion de la zone par Israël en 1981.

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Le village a été occupé par Israël en 1967, et nombre de ses habitants avaient exprimé leur appartenance à Israël et refusé de se retrouver sous hégémonie libanaise, accusant l’État libanais d’indifférence et de les abandonner.

Les habitants de Ghajar ont vécu près de vingt ans d’occupation israélienne au sud du Liban et, en l’absence d’État de droit, le village s’est étendu au nord, sur des terres appartenant à l’État libanais, et vers le village de Mari.

En 2000, lorsque les forces israéliennes ont quitté le sud du Liban après dix-huit ans d’occupation, les habitants de Ghajar ont vu leur village divisé en deux : le sud de la ligne bleue est resté sous autorité israélienne, tandis que la partie nord est considérée comme faisant partie du Liban.

Des parents et des voisins, qui vivaient depuis des années de l’autre côté de la rue, ont été séparés un matin par une clôture et se sont retrouvés dans un autre pays, à savoir dans un « État ennemi ».

Israël n’a jamais retiré ses forces du village de Ghajar après la démarcation de la frontière en 2000, malgré un plan du gouvernement israélien en ce sens en 2010.

Le village a été désigné zone militaire fermée pendant 22 ans, mais en novembre 2022, il a été ouvert aux touristes et visiteurs israéliens avec l’autorisation de l’armée israélienne.

Tout comme les fermes de Chebaa et les collines de Kfar Chouba, Ghajar reste entre les mains d’Israël, mais avec une différence, à savoir que le territoire de Ghajar est maintenant entouré d’un mur de clôture, l’incorporant à Israël et le séparant du Liban.

Traduit de l’anglais (original) et actualisé.

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